La nuit,
Un bus,
Un bus de banlieue
- Il file à travers les barres d’immeubles...
... Vous levez les yeux et là
Vous voyez par dizaines, de petites lumières
Petites lumières jaunes
Empilées les une au dessus des autres...
Quadrillages infinis, silence éternel, qui se perdent en hauteur
Et tout là bas, aussi...
Au fond, là bas, au loin,
Des lumières toutes semblables
Et si l’une s’éteint, c’est peut-être des gens en larmes...
(Douleurs, arrachements, souffrances)
Tout cela qui monte,
Dans l’impression de solitude...
La solitude du malade,
Dans une chambre trop claire,
("Si vous avez besoin de quelque chose sonnez....")
La solitude de l’étudiant,
- Sa famille au loin, les révisions sous la lampe
("Prends soin de toi, n'oublie pas, mange bien et dors...")
La solitude du vieillard,
Une solitude de vieux, la solitude emplie des vieux fantômes,
Une solitude qui, lorsqu’elle s’éteint, pourtant,
Laisse parfois la place à d’autres solitudes, inconsolables et infranchissables,
Incommunicables,
La solitude de tous,
La solitude de ces êtres qui sont autour de nous,
Cette solitude qui d'un seul coup, vous pousse
A vous enfourner dans les transports, dans les grands magasins les veilles de Noël,
Juste pour sentir la chaleur des corps,
Pour croiser des regards absents, pour tenter de sentir autour de soi,
La vie, les autres,
Un souffle, un je-ne sais quoi...
Cette solitude qui vous pousse chaudement au creux des reins pour vous noyer dans les foules,
- A coudoyer les autres -
Des regards que l’on tente de croiser et qui se dérobent,
Et le silence, toujours le silence,
Car on est devenu avare de parole...
Et vous êtes là, seul,
Dans un bus,
Un bus de banlieue
Qui file à travers les barres d’immeubles...
... Vous levez les yeux et là
Tout autour, dans les barres d’immeuble,
C’est la nuit...
Dans le bus, un vieillard se retourne : un enfant lui dit quelques mots,
Le vieillard sourit...