Comme je vous l'ai déjà dit hier, ma vie à la maison est parfaitement trépidante... La vie quotidienne regorge de quantité de choses à voir et à vivre et il faut le faire de toute son âme et de tout son coeur...
Comme je vous l'ai déjà dit, également, ma présence parmi vous n'est pas que le fait du hasard. Non, un Destin bien plus grand, plus haut, m'a permis, lorsque j'étais enfant de me sortir d'embarras mortels...
Et notamment de ce jour, où j'eus assez de sang-froid pour rester maîtresse de mes nerfs jusqu'au bout (ce qui ne serait plus possible aujourd'hui, je préfère le dire d'avance...).
Jamais je n'oublierai cette fin d'après-midi, où je revenais de l'école primaire en dégustant un pain au raisins comme à mon habitude. Le simple récit de cette anecdote doit par ailleurs convaincre tous les passionés par mes habitudes alimentaires du bien-fondé des sucreries que j'aime croquer, en souvenir de ce jour mémorable...
En arrivant dans le salon, je lève les yeux et par la fenêtre de la cuisine, j'aperçois deux hommes marchant sur le toit, qui est à cet endroit si pentu et si haut que je me sens prise de vertige pour eux.
Puis passée la compassion, je songe aux vélux du toit, qui aérent les appartements du dernier étage qui ont déjà été cabriolés plus d'une fois...
Je commence à me demander ce qu'ils viennent faire là, quand tout à coup, j'entends un bout de phrase révélateur de leurs attentions profondes...
Clairement, distinctement j'entends
"passe moi le pistolet"...
GLOUPS... !
Je ne sais pas si vous vous êtes déjà trouvé là quand deux personnes sortent un pistolet mais je peux vous dire que pour moi, c'est à peu près comme voir déjà ma fin toute proche mais alors là, vraiment tout près tout près...
Ou alors, comme rencontrer un dinosaure carnivore dans un couloir...
Je sais pas à quoi comparer ça...
(Tiens, allez, un petit exercice, écrivez-moi ce qui vous ferez le plus peur, comment vous écririez la peur...)
Bref, je rigole, mais à ce moment-là, je rigolais pas, c'est moi qui vous le dis.
Comme je suis dotée de solides capacités intellectuelles, (l'école me la bien dit) ; je raisonne suivant le plan suivant :
- Pistolet = mort.
- Types sur le toit = cambrioleurs.
- Moi = individu gênant à supprimer pour voler ce qu'il y a pas à voler dans ma chambre.
Un cruel dilemme se pose à moi : me montrer dans toute la force de mes dix ans et les mettre en fuite, traverser le salon bien à leur vue et aller prendre mes biens (une petite chaîne en or, c'est pour ça qu'ils vont me faire la peau, n'en doutez pas une seconde...) ou alors, appeler la police.
Comme je suis extrêmement courageuse, je décide de m'offrir une alternative ; je me cache sous la table et décide d'attendre qu'ils aient fait leur sac... Et qu'ils se soient fait la malle...
Un peu angoissée (c'est un euphémisme) je décide d'aller prévenir ma mère qui se trouve à l'autre bout de l'appartment...
Mais pour cela, je dois passer devant la fenêtre et donc, devant leur angle de vision ; c'est sûr, s'ils voient quelque chose bouger derrière la vitre, ils vont tirer, et je serai morte et je ne pourrai pas vous raconter cette histoire ni aller prévenir maman...
Alors, je décide de ramper.
Et je rampe...
Pendant d'interminables minables minutes...
jusqu'à maman et d'une voix blanche je lui explique qu'ils sont là, avec le pistolet (sûrement doté d'un viseur) et qu'ils vont nous tuer et nous voler tout ce qu'on a et que ça va être terrible et que j'ai pas envie d'être tuée qu'il faut appeler la police... etc. etc.
je ne sais plus ce que nous avons fait. je pense que j'ai dû rester assise dans ma chambre en tremblant comme une feuille et que maman a dû aller voir, ce qui ne faisait qu'augmenter mes tremblements de frousse.
J'ai dû m'endormir de peur ensuite, en constatant qu'ils étaient partis. Je ne me souviens de rien d'autre que des deux hommes sur le toit...
Et qu'au fil de la conversation, à table, le soir, mes parents évoquaient les peintres du syndic qui étaient venus passer un coup de décapant sur les tuiles du toit...