Mitigée ! ?Je sais que presque tout le monde adore cette bd qui a été primée en festival. L'idée est intéressante : Delisle suit sa femme qui travaille pour Médecins sans frontières et découvre Jérusalem-Est. Reprenant le dispositif de l'oeil naïf qui découvre le monde il invite à la découverte, à l'observation d'éléments surprenants et révélateurs. Le graphisme épuré est sympathique ; Delisle manie l'autodérision ce qui amène un peu de légèreté dans le sujet. Je regrette que l'alternance de monochromes ne soit pas relevé par un peu plus de vivacité pour établir une hiérarchie entre les éléments qui finissent par se dissoudre et laisse émerger des bribes d'anecdotes sur la vie personnelle qui mériteraient d'être explorées en lien avec le thème. Je n'ai pas appris grand chose sur la ville. Peut-être l'auteur a-t-il voulu montrer le verrouillage de cette zone et la difficulté de communiquer ? Je ne sais pas. Je trouve que la dimension humaine n'apparaît que trop peu. On a vraiment le sentiment d'une étanchéité entre le monde de l'expatrié et le pays dans lequel il est immergé.
Delisle affiche une parfaite neutralité religieuse ( ''je suis athée Dieu merci'') mais si celle-ci permet d'observer certaines incohérences de manière amusée, elle me semble trop présente sans contre-pouvoir. L'auteur m'a fait sourire dans sa découverte éberluée du paradoxe des étudiantes en arts qui ne peuvent représenter de figures humaines. Ou dans ces explications réductrices sur Pourrim. Cette tentative pour aborder naïvement la réalité me semble un peu vouée à l'échec car il risque fort d'être confronté au danger de l'immédiat manichéen, de l'incompréhension des grandes problématiques qui demeurent le fond des conflits, de la réduction à des images sans assez profondeur pour saisir les individualités... Pour finir dans une vision un peu partisane sous couvert de naïveté. Bref, il ne me reste presque rien de cette Jérusalem de bd et des quatre après midi passés là-bas. Et pourtant qui a écrit '' Si je t'oublie Jérusalem...'' ?