Cela n'étonnera pas les gens qui ont pu me fréquenter d'un peu près...
Ce matin, je viens de lancer le coup d'envoi de ma rentrée littéraire à moi, celle qui m'appartient... Hommage du jour au seul livre de la rentrée littéraire que j'ai commencé à entamer, et ce, d'autant plus qu'il m'a été offert par un ami...
Enfant, dans la cour de récréation, je contemplais la lumière de Septembre et je regardais les marrons durant tout le premier de cours avant de me mettre au travail... Et bien, comme j'ai gardé quelques habitudes d'alors, je passe la rentrée littéraire à regarder les couvertures des livres avant de faire mon choix...
Il sera ciblé, bien sûr et cette année, je jette mon dévolu sur ... Le dernier Pascal Quignard bien sûr !
La Barque Silencieuse, vous emmène aux confins de l'anecdote, et ranime, encore une fois ces petites braises de culture éteintes par le temps et sur lesquelles Pascal Quignard ne cesse de souffler... Tout comme dans ses Petits Traités, la forme fragmentaire tente de cerner au plus près les mouvements de le pensée, les vacillements de l'anecdote...
Lorsque je parle de Pascal Quignard, j'entends souvent un certain nombre de remarques, auxquelles je vais répondre ici :
- Pascal Quignard, c'est trop hermétique, on n'y comprend rien...
- Pascal Quignard, c'est trop fractionné, on a pas le temps de rentrer dans l'écriture...
- On a du mal à saisir le rapport entre les choses, c'est fatiguant à lire...
- Il parle de quoi ?
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Je vais donc tenter de répondre ici à ces quelques objections... :
- Certes, c'est hermétique. A première vue. Reste à examiner ce qu'on entend par "trop" hermétique. L'écriture de Pascal Quignard se fonde sur le présupposé d'une vaste culture et même d'un désir. Le manque, l'appel de la totalité du savoir guide alors notre lecture. Nous nous laissons porter par les interstices de l'histoire, les petits faits que la culture a plus ou moins retenus et notre imagination doit se laisser emporter par l'écriture. Libre a nous de rêver sur la pluralité des anecdotes, de les retrouver, comme lors d'une enquête policière...
- Évidemment, il serait difficile de contester la fragmentation de l'écriture à première vue. Cependant, il faut expliquer cette question purement formelle par le monde des idées. ( Ne commettons pas une erreur purement structuraliste, car les structures ne sont pas seules porteuses de sens -coup de griffe au passage... ! ) Le monde de Pascal est évidemment assez sombre, non pas directement, mais plutôt indirectement. Son écriture est en fait résolument classique et l'antiquité est présente à chaque page. Son dernier livre, par le thème de la barque peut évidemment faire écho à la tradition mythique du poète Orphée, dont Pascal Quignard est une sorte de double moderne. Ainsi, la lecture de son œuvre demande d'entrer dans une ambiance, dans un état d'esprit marqué par la ruine, la mort et la perte, dont les fragments de texte sont comme les pierres émergées dans la lande culturelle dévastée.
- Un réseau poétique se tisse de phrases en phrases et même de paragraphes en paragraphes dans les Petits Traités, un court entre les textes formant le traité. A nous de reconstituer la formule poétique qui nous fait passer d'un texte à un autre. La discontinuité est, là encore apparente, car elle joue sur une forme d'association d'idées et d'écriture rêveuse...
- Avoir une bonne encyclopédie dans la tête et sous la main peut être un bon début pour se lancer dans cette lecture...
Petit bonus ( 1) : Pourquoi j'aime Pascal Quignard...?
Dans une époque (les temps ont bien changés et oui ma bonne dame...) où la littérature commerciale triomphe, il faut reconnaître que Pascal Quignard tire bien son épingle du jeu. Que je sache, la médiatisation de Pascal Quignard est bien moins vulgaire que celle d'auteurs tels Beigbeder ( mon obsession). Pascal Quignard ne met pas sa photo sur les couvertures pour vendre ses livres, Pascal Quignard essaye de répondre aux questions qu'on lui pose sans faire son arrogant... Pascal Quignard enfin présente à mes yeux l'avantage d'offrir une littérature qui demande quelque réflexion. je ne pense pas qu'on puisse lire du Pascal Quignard pour rigoler ou pour se divertir un bon coup. La tentative de son écriture enfin, manipule avec une grande subtilité le rapport à l'ironie, ce qui me fait penser que cet auteur est un des seuls créateurs de notre époque. Tant mieux s'il se trouve poussé sur le devant car certains qui se croient très malins ne joueront jamais dans la même cour que lui...L'exemple même de l'auteur qui, pour moi, a su trouver le bon compromis entre vente de ses livres ( il serait quand même assez déplacé de critiquer l'envie qu'on les auteurs de vendre, cela n'st pas nouveau - cf. Balzac) et une écriture personnelle et cultivée...
Petit bonus ( 2 ) : voici quelques liens vers d'autres sites parlant de Pascal quignard de façon assez éclairante pour en (re)goûter la lecture...